Professeure ordinaire à la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL
Cheffe du Centre de neurosciences psychiatriques (CNP) du CHUV
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Professeure ordinaire à la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL
Cheffe du Centre de neurosciences psychiatriques (CNP) du CHUV
Petite, vous vouliez être…?
Je suis née au Nord-Vietnam, où j’ai vécu la guerre. De plus, en Asie, la notion d’«enfant», et par extension des aspirations d’un enfant pour son avenir, n’avait pas vraiment cours. Donc il m’est difficile de répondre à la question. Mais c’était la guerre, beaucoup de gens souffraient, et je voulais aider.
Votre livre de chevet?
La ballade de l’impossible, de Haruki Murakami.
Le film qui vous accompagne?
Rashomon, d’Akira Kurosawa.
Un ou une artiste qui vous inspire?
Wao Zou-Ki, un peintre né en Chine, puis naturalisé français, et qui a su trouver son chemin entre ces deux cultures, occidentale et asiatique.
La ville de vos rêves?
Je n’en ai pas. Au fil de mes pérégrinations, j’ai toujours transporté ma maison – ma ville - avec moi.
Un lieu, un jardin secret où vous aimez vous ressourcer?
Mon jardin, où nous avons fait construire un pavillon de thé, au bord du lac.
La fleur que vous aimez?
L’orchidée. Il y a plus de 30'000 espèces, toutes plus belles et intéressantes les unes que les autres ; elles reflètent les milles facettes de l’âme humaine.
Un animal-totem?
Un oiseau, sans être spécifique. Pour s’envoler, être libre.
Quel don souhaiteriez-vous posséder?
Je parle beaucoup de langues, j’ai toujours vécu dans le bilinguisme – en vietnamien et en allemand, en vietnamien et en français, et bien sûr en anglais pour la science. Mais j’ai l’impression de n’en maîtriser aucune à 100%... J’aimerais être éloquente dans ma langue d’élection.
Et si vous aviez un superpouvoir?
Amener la paix dans le monde. Ce qui passe d’abord par la paix intérieure.
Vos héros/héroïnes dans l’Histoire?
J’ai trop vécu pour avoir un héros en une seule personne. Chaque personne à son ying et son yang, sa part dans la lumière et sa part dans l’ombre, il faut l’accepter.
Et si vous étiez un personnage de fiction?
Pour moi, comme je l’ai déjà dit, un «héros» n’est pas vraiment une notion.
Technophile, technophobe?
Entre les deux. La technologie est utile, elle doit servir une vision, une mission ou une question importante, mais elle ne doit pas être la vision, elle ne doit pas gouverner.
Vos 3 priorités aujourd’hui?
Au niveau professionnel, allier passion et mission. Cela veut dire concrètement promouvoir la psychiatrie translationnelle. Et former une relève dans ce domaine.
Au niveau familial, aider ma fille à trouver sa voie.
Votre devise?
Abattre les murs, créer des liens.
Votre rêve de bonheur?
Le bonheur, la beauté sont des choses éphémères, il faut savoir les attraper quand ils sont là. Je dirais: trouver la paix intérieure.
Comment aimeriez-vous mourir?
Une mort abrupte, sans souffrance. Mais le problème, ce n’est pas celui qui meurt, ce sont ceux qui restent. Je ne veux pas qu’ils subissent la lourdeur de ma mort.
Quelle forme de spiritualité vous inspire?
J’ai été élevée dans le bouddhisme, qui m’a appris la tolérance, le respect des êtres, y compris les animaux et les plantes. Depuis j’ai développé ma propre pensée.
Un facteur, une rencontre qui a déterminé votre carrière?
Lors d’une conférence, une maman dans l’auditoire m’a interpelé. Son fils montrait des signes précoces de schizophrénie et elle m’a demandé: «Pouvez-vous faire quelque chose?». Cela a été un déclic pour une vision plus translationnelle.
Dans dix ans, vous vous verriez bien...?
Je suis surtout dans le temps présent. J’espère contribuer à l’amélioration des conditions des patients psychiatriques, et de leur perception par le public. Développer les connaissances permet aussi de déstigmatiser.
Les 3 missions d’une Faculté de biologie et de médecine?
C’est déjà une grande mission d’allier biologie et médecine! On peut être fier de ce qu’on a fait avec les moyens à disposition. Mais je pense qu’il faut repenser la formation dans une optique translationnelle, en mettant le patient au centre.
En deux mots, pour vous, le CHUV/l’Université c’est…?
C’est une institution qui a à cœur de servir les patients. Toutefois, aussi bien dans la recherche que dans les soins, nous subissons trop la charge administrative. On perd un peu de vue l’essentiel, notre raison d’être.
Entre recherche fondamentale et appliquée, où vous situez-vous?
Je n’aime pas cette question! Je n’envisage les deux qu’ensemble.
Pour une recherche au service du patient/de la population ou plutôt de la connaissance?
Le patient – l’humain – d’abord. La connaissance doit être à son service.
Comment définiriez-vous les défis actuels de la formation, de la transmission du savoir?
Dans un contexte de moyens limités, il faut donner des priorités, dans une vision à long terme. Il faut du courage, on risque d’être impopulaire.
Un outil essentiel pour assurer une relève de qualité?
Revenir à la base. Nous avons une ambition plus grande que nos moyens.
Bien communiquer, c’est ?
S’adapter au niveau de son interlocuteur. Etre vrai, dans le respect mutuel.
Dans votre domaine de compétences, un projet qui vous tient particulièrement à cœur?
Promouvoir la psychiatrie translationnelle. Pour commencer, il faut que cliniciens et biologistes boivent le café ensemble et parlent le même «langage»!
Par Nicolas Berlie - Communication FBM
19 janvier 2018